L’une des questions fondamentales de cette seconde guerre mondiale est de
savoir si l’on avait connaissance du massacre systématique des Juifs. Et
surtout qui savait et à quelle date ? La réponse à cette question est
douloureuse. Le déni est aujourd’hui encore une évidence. Voici quelques
éléments de réponses.
Ils sont assassinés par des gaz toxiques. Jan Karski
Dès le mois de mai 1942, un rapport du Bund, l’Union Générale des Travailleurs Juifs
créé en 1897, fait état de plus de 700.000 Juifs polonais assassinés par les
Allemands.
Des informations précises avaient été distillées durant toute l’année 1942. Après les
grandes rafles du sinistre été 1942 et l’évidence du génocide juif, les alliés
déclarèrent solennellement en décembre 1942 que les coupables seront poursuivis
et jugés le moment venu. Cela n’intimide aucunement les nazis qui poursuivent avec
plus de détermination encore leur projet de solution finale décrétée à Wannsee en
janvier de la même année.
Entre temps, en août 1942, l’archevêque de Toulouse, Monseigneur Saliège
dénonce les déportations et entrevoit les massacres dans une lettre qu’il demande à
lire dans les églises.
« Mes très chers Frères,
Il y a une morale chrétienne, il y a une morale humaine qui impose des devoirs et
reconnaît des droits. Ces devoirs et ces droits, tiennent à la nature de l’homme. Ils
viennent de Dieu. On peut les violer. Il n’est au pouvoir d’aucun mortel de les
supprimer.
Que des enfants, des femmes, des hommes, des pères et des mères soient traités
comme un vil troupeau, que les membres d’une même famille soient séparés les uns
des autres et embarqués pour une destination inconnue, il était réservé à notre
temps de voir ce triste spectacle.
Pourquoi le droit d’asile dans nos églises n’existe-t-il plus ?
Pourquoi sommes-nous des vaincus ?
Seigneur ayez pitié de nous. Notre-Dame, priez pour la France.
Dans notre diocèse, des scènes d’épouvante ont eu lieu dans les camps de Noé et
de Récébédou. Les Juifs sont des hommes, les Juives sont des femmes. Tout n’est
pas permis contre eux, contre ces hommes, contre ces femmes, contre ces pères et
mères de famille. Ils font partie du genre humain. Ils sont nos Frères comme tant
d’autres. Un chrétien ne peut l’oublier.
France, patrie bien aimée France qui porte dans la conscience de tous tes enfants la
tradition du respect de la personne humaine. France chevaleresque et généreuse, je
n’en doute pas, tu n’es pas responsable de ces horreurs.
Recevez mes chers Frères, l’assurance de mon respectueux dévouement.
Jules-Géraud Saliège, Archevêque de Toulouse. 23 août 1942.
A lire dimanche prochain, sans commentaire. »
Les presses américaine, britannique ou spécifiquement juive se font également
l’écho auprès du grand public, parfois en première page dès juin 1942, de
l’assassinat en masse des Juifs.
D’autres messages d’alerte concernant la préparation du génocide de tous les Juifs
d’Europe ne seront pas plus écoutés à l’époque. A l’instar du télégramme envoyé par
Gerhart Riegner, juriste pour le Congrès juif mondial en Suisse, en août 1942 à la
Chambre des communes et au président du Congrès juif mondial pour la Grande-
Bretagne. Le message est on ne peut plus clair : « … tous les Juifs, au nombre de
3.5 à 4 millions devraient, après déportation et concentration à l’Est, être d’un seul
coup exterminés pour résoudre, une fois pour toutes, la question juive en Europe. »
Le gouvernement polonais en exil donne l’alerte sur ce qui se passe sur leur territoire
annexé par l’Allemagne hitlérienne. Personne ne l’entend.
Le 9 octobre 1942, Anne Frank écrit dans son journal :
« Chère Kitty,
Aujourd’hui, je n’ai que des nouvelles sinistres et déprimantes à te donner. Nos
nombreux amis et connaissances juifs sont emmenés par groupes entiers… Nous
supposons que la plupart se font massacrer. La radio anglaise parle d’asphyxie par
les gaz ; c’est peut-être la méthode d’élimination la plus rapide. Je suis complètement
bouleversée. »
Un résistant polonais du nom de Jan Karski s’introduit clandestinement à l’automne
1942 dans le ghetto d’Izbica-Lubelska et il est le témoin du départ d’un convoi de
déportés juifs pour le centre de mise à mort de Belzec. Dans son rapport, il écrit :
« …bon nombre sont emmenés à Belzec, camp voisin où ils sont assassinés par des
gaz toxiques. »
Karski fut envoyé à Londres en novembre 1942 par le gouvernement polonais en exil
pour alerter les britanniques et les américains sans que ceux-ci ne réagissent.
A l’automne 1942, on organise en Palestine, un deuil national de 3 jours, du 30
novembre au 02 décembre 1942, en mémoire de l’extermination des Juifs d’Europe.
Si les Juifs de Palestine savaient ce qui se passait en Europe, comment les
puissances occidentales l’ignoraient-elles ? C’est à cette date que des Juifs arrivent
de Pologne en Palestine suite à un échange de prisonniers entre les allemands et les
britanniques. Ils racontent. C’est également à la fin 1942 que l’on voit s’installer une
ébauche du Mémorial de Yad Vachem à Jérusalem pour commémorer les morts de
la Shoah et qui sera inauguré en 1953.
Pendant toute la durée de la guerre, la Croix Rouge s’est également rendue
coupable de ne pas avoir dénoncé le sort des Juifs, par indifférence, par lâcheté ou
par complaisance avec le régime nazi ? De nombreux membres de la Croix Rouge
étaient en première ligne et donc forcément au courant de ce qui se passait dès
1942 à propos de la solution finale. Après une visite au camp d’extermination
d’Auschwitz, le rapport de la Croix Rouge indiquait que tout était normal.
Pire encore fut l’attitude du pape Pie XII, élu en mars 1939. Pourquoi oublier que Pie
XII était germanophile et sans doute anti-juif comme l’était une grande partie de
l’institution vaticane de l’époque. Il brilla par son silence et fut incapable de dénoncer
les crimes et le génocide contre les Juifs alors qu’il connaissait sans aucun doute le
sort qui leur était réservé. L’ouverture des archives du Vatican ne change rien aux
faits.
Les raisons invoquées pour cette amnésie ou ce déni par les uns et les autres sont
multiples mais aucune n’est convaincante. Le sort des Juifs n’était pas une priorité
dans cette guerre, c’est le moins que l’on puisse dire et quasiment aucune action de
sauvetage ne sera organisée, pas même le bombardement des lignes ferroviaires
menant aux camps ou des usines de production allemandes à Auschwitz.
Les preuves de l’existence de la solution finale ont été transmises en cette année
1942 au plus haut niveau, jusqu’à Churchill et le War Refugies Board en Suisse puis
à Washington. Les Juifs ont été abandonnés à leur triste sort.
Concernant les Etats-Unis, sans entrer dans le détail, le pays était traversé par un
fort courant antisémite. Est-ce ce qui a freiné à trouver une réaction honorable à
l’horreur ?
L’on peut également relater l’exploit de deux hommes, Rudolph Vrba et Alfred
Wetzler.
Internés dès juin 1942 à Auschwitz, ils réussissent à s’évader du camp le 10 avril
1944, après avoir été les témoins de l’extermination dans les chambres à gaz des
Juifs venus de France et de Hollande en 1942 et 1943. Ils vont alerter les dirigeants
juifs de Slovaquie (Haut Conseil juif) du génocide en cours par un rapport détaillé du
nom de Rapport Vrba-Wetzler. Ce document sera transmis à l’Ouest et rendu public
en juin 1944. Rien de positif n’en sortira pour les Juifs de Hongrie qui seront décimés
cette année-là. En 1963, Vrba publiera ses mémoires dans un livre intitulé I Cannot
Forgive (Je ne peux pardonner).
Comme indiqué plus haut, un point important doit être éclairci en ce qui concerne la
collusion entre le nazisme et l’islamisme. Ce sujet est particulièrement bien traité par
Georges Bensoussan dans son ouvrage déjà cité Juifs en pays arabes.
En fait, il faut bien comprendre qu’Hitler a mis en place, dès 1939, un programme
complet de propagande à destination des pays arabes avec la construction de
puissants émetteurs radios et avec le financement d’émissions en langue arabe où le
fiel antisémite et antibritannique y est déversé sans discontinuer comme une diarrhée
verbale. Des passages de la Sunna contenant des propos antijuifs sont même
diffusés par les radios allemandes pour justifier de la proximité de l’islamisme avec
les thèses nazies.
On ne doit donc pas être surpris de la germanophilie des populations arabes et de
leur adhésion aux thèses nazies pendant cette seconde guerre mondiale. Ce monde-
là souhaitait autant que les nazis l’éradication des Juifs sur les territoires qu’ils
voulaient s’approprier, début de l’entreprise Judenrein et Christianrein.
Les 52 Rugissants - Essai sur les antisémitismes
William V. Ouaki
Une question lancinante convoquée devant le déni général. Qui savait ?
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